2ème dimanche ordinaire (année C)

Auteur: Philippe Cochinaux
Date de rédaction: 20/01/19
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2018-2019


A l’occasion de la fête de l’Épiphanie, certains prédicateurs continuent de parler de la fête des rois mages alors que nous savons aujourd’hui qu’ils étaient plutôt des savants et non des rois.  Sans doute, ces prédicateurs continuent d’être influencés par la théologienne Sheila qui chante « comme les rois mages en Galilée ». 

Et il en ira sans doute à nouveau de même aujourd’hui, où certains continueront de parler du miracle de Cana.  Chercher à prouver la divinité de Jésus par des miracles risque de conduire à la voir comme une forme de magicien qui accomplit des choses extraordinaires et incompréhensibles pour tout être humain.  Pire, ces prédicateurs utilisent le mot de « miracle » alors même que l’évangéliste Jean invite à la plus grande prudence quant à ce qui s’est passé ce jour-là.  En effet, à la fin de l’évangile que nous venons d’entendre, il est dit : « tel fut le commencement des signes que Jésus accomplit ».  Ne nous attardons donc pas sur ce qui a première lecture peut apparaître comme sensationnel voire prodigieux mais prenons plutôt le temps de relire ce texte et de nous attacher plutôt à sa signification. 

Une clé de lecture possible est celle de comprendre que ce premier signe de la vie publique du Christ est là pour marquer de manière très subtile le passage du judaïsme au christianisme ou pour le dire autrement l’annonce de la fin d’un monde et l’entrée dans le Royaume de Dieu.  Ce n’est d’ailleurs sans doute pas anodin que ce premier signe se réalise au cours d’une noce.  Les époux ont échangé leurs alliances tout comme Dieu a fait alliance avec peuple.  Et le Fils de Dieu marque ainsi le fait que lui aussi, au début de sa vie publique, s’inscrit dans cette alliance avec Abraham et marquée de l’arc-en-ciel dans le récit de Noé.  Toutefois, tout en s’inscrivant dans cette histoire de l’humanité, le Christ tient en même temps à signaler qu’un monde nouveau est en train d’émerger.  Il n’utilise pas n’importe quelle jarre pour réaliser ce premier signe.  L’évangéliste nous dit : « Or, il y avait là six jarres de pierre pour les purifications rituelles des Juifs ; chacune contenait deux à trois mesures, (c’est-à-dire environ cent litres) ».  Ce petit détail des jarres montre que Jean veut faire allusion aux rites dans l’ancienne Alliance.  Et en soulignant que celles-ci étaient vides puisque Jésus demande de les remplir, cela signifie que le temps de l’ancienne Alliance est révolu.  Il fait partie à jamais du passé.  Une nouvelle Alliance est annoncée.  Les jarres ne feront plus jamais référence à un rite ancien, elles servent dorénavant à contenir une boisson nouvelle : le vin.  Une fois encore rien n’est anodin dans tous les détails de cet évangile.  Le vin est la boisson de la fête.  Il est également la boisson des temps messianiques, la boisson du Royaume de Dieu.  Par ce signe de Cana, le Fils de Dieu nous convie à participer à une vie nouvelle, à une vie renouvelée par le don qu’il nous a fait.

         De quelle manière ce signe peut-il aujourd’hui encore nous aider dans nos vies ?  Tout d’abord, par le fait que le Christ va transformer six cents litres d’eau en vin, nous sommes invités à prendre conscience que ce vin nouveau nous est offert en abondance.  Toutes et tous nous sommes donc conviés à vivre l’abondance de la vie, c’est-à-dire à vivre chaque moment de nos vies comme si c’était le dernier.  En prenant conscience de notre propre mortalité, nous remettons de la vie dans la Vie puisque nous acceptons que nous ne saurons jamais de quoi demain sera fait.  Vivre la vie en abondance, c’est donc profiter de chaque instant qu’il nous est donné à vivre et consentir à ce que la joie de l’évangile nous nourrisse et nous fasse rayonner.  Ensuite, le signe de Cana nous fait découvrir qu’il s’agit d’abord et avant tout d’un don de Dieu.  Puisque c’est un don, nous sommes à notre tour conviés à mettre de la gratuité dans nos vies en prenant ou reprenant le temps de donner de notre temps à celles et ceux qui ont besoin de notre attention.  Et enfin, confirme le maître du repas des noces de Cana, le vin sorti des jarres était un bon vin, bien meilleur que celui qui fut servi avant.  Par ce signe, nous sommes cette fois invités à mettre de la qualité dans nos vies.  En d’autres termes, si nous mettons nos pas dans les traces du Fils de Dieu, nous avons à veiller à la qualité non seulement de nos vies mais également des relations que nous construisons et que nous entretenons tout au long de notre pèlerinage terrestre.  Le vie nouveau de Cana nous propose de mettre de la joie dans nos vies.  Et la joie de l’évangile n’est possible que si nous faisons vivre en nous et autour de nos l’abondance, la gratuité et la qualité. A votre santé !

Amen