18ème dimanche du temps ordinaire (A)

Auteur: Philippe Cochinaux
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2019-2020

Ayant appris une triste nouvelle, le superhéros Superman décida de se retirer dans le désert du Névada.  Superman étant un superhéros, il se devait d’être américain.  Mais ses admirateurs l’ayant appris décidèrent de le rejoindre.  Tout comme l’histoire de l’évangile que nous venons d’entendre, les admirateurs américains n’avaient pas songé à prendre à manger et à boire avec eux.  La nuit commençait à tomber et la faim et la soif se firent sérieusement ressentir.  Superman fut alors pris de compassion pour toute ces foules.  Il décida d’enfiler son costume de superhéros et survola de lui-même jusqu’à Las Vegas, repéra un supermarché et comme il est vraiment très fort, prit dans ses bras toutes les victuailles nécessaires pour nourrir toutes la foule.  Il faut dire qu’ils étaient très nombreux: plus de vingt mille personnes car, dans son comptage, la police avait intégré les femmes et les enfants.  Comble de bonheur, ils eurent à manger à satiété. 

Quelle différence y a-t-il donc entre Superman et Jésus ?  Tout d’abord, constate la théologienne Marion Müller-Collard, « un superhéros agit toujours seul.  Il ne peut compter que sur lui-même ou plutôt sur ses superpouvoirs.  Aussi, sa relation avec les autres ne peut être qu’une relation asymétrique d’admiration, qui maintient la foule en dépendance et en passivité.  De plus un superhéros n’a rien à transmettre: les superpouvoirs cela ne s’apprend pas ».  Et enfin dans la vie réelle, un superhéros n’existe que dans un roman, une bande-dessinée ou au cinéma.  Toutefois, il nous arrive nous aussi parfois d’oublier cette réalité lorsque nous attendons que Dieu fasse un miracle, change le cours de certains événements de nos vies, ressuscite l’être aimé parti toujours trop tôt.  Nous crions vers le Ciel, implorant sa compassion pour notre situation et espérons que quelque chose d’exceptionnel venu de Lui puisse se produire. Cette attitude est bien évidemment profondément humaine lorsque nous sommes terrassés par une situation douloureuse où nous nous sentons tellement impuissants.  Lorsque nous sommes confrontés à cette réalité, quittons nos histoires de superhéros et revenons à l’évangile de ce jour.  Comme nous pouvons le constater, il en va tout autrement avec l’épisode de la multiplication des pains. Le Christ ne prend pas son bâton de pèlerin pour se rendre au village et acheter les victuailles nécessaires pour nourrir toute la foule.  Il renvoit les disciples à eux-mêmes: « donnez-leur vous-mêmes à manger ».  Puis, il se contente de ce qu’il a ou de ce qu’il reçoit puisque dans l’évangile de Jean, il est mentionné que c’est un jeune garçon qui apporta ces cinq pains et ces deux poissons.  Ce qu’il a, c’est peu tout en étant pas rien.  A partir de là, il bénit ce repas et partage cette nourriture à ses disciples les invitant à la donner à la foule.   Par ces simples gestes, le Christ nous invite à notre tour à entrer dans une dynamique de partage et de don.  Cette dernière est fondamentale dans notre Vie de foi.  N’attendons-pas que tout nous vienne d’en-haut mais voyons plutôt comment nous, nous pouvons à notre niveau entrer dans une véritable dynamique de solidarité et de partage.  En effet, en disant à ses disciples « donnez-leur vous-mêmes à manger », Jésus ne revendique pas ce pouvoir d’accomplir ces prodiges mais demande plutôt à ses disciples de le faire. Et cette fois, non pas à la manière des superhéros ou encore des magiciens mais par le simple acte du don et du partage.  Cette manière de faire est une invitation concrète pour nos vies d’aujourd’hui.  Car si Jésus avait joué au superhéros en nourrissant de lui-même toute la foule, nous pourrions alors lui reprocher son inertie face aux réalités de notre monde actuel où tant de gens ne peuvent manger à leur faim.  Tandis qu’en demandant à ses disciples « donnez-leur vous-mêmes à manger », il nous invite à notre tour à entrer dans cette dynamique du partage et du don.  Le miracle est donc encore possible aujourd’hui.  Le Christ, en agissant de la sorte, nous pousse à agir à notre tour.  Mieux que cela, il nous révèle que nous avons en chacune et chacun de nous la capacité de donner et de partager.  C’est une des raisons de notre condition de disciples.  Aujourd’hui encore, Jésus, dans cet acte simple de partage et du don, nous redit que nous sommes conviés à toujours vivre du choix du plus d’amour.