6e dimanche de Pâques, année C

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : C
Année: 2000-2001
 Mes chers enfants, je vous quitte... Je vais tous vous bénir, sans exception, vous pour qui j'ai tant prié tous les jours de ma vie, pour que vous soyez des foyers heureux et chrétiens et que vous restiez tous unis ». Ces paroles, vous ne les avez sans doute jamais entendues même si elles nous en rappellent d'autres. Ce sont en fait les dernières paroles de mon grand-père maternel. Après avoir dit ces quelques mots, il a béni ses huit enfants puis s'en est allé tout en douceur et en confiance de l'autre côté de la lumière. A suivi alors le temps de l'apprentissage de l'absence, d'un deuil à devoir faire pour continuer à vivre. Un chemin à découvrir pour ne pas l'enfermer dans les vestiges d'un passé à jamais révolu mais plutôt une occasion d'enraciner sa propre vie dans ce qu'il avait semé en chacun de ses enfants et petits enfants. Il n'est plus de ce monde, il s'en est allé dans sa propre lumière. Et chaque fois que nous faisons l'expérience d'un deuil, ici sur terre, nous sommes forcés de faire ce type de chemin alors que souvent nous ressentons un vide, une grande absence, un profond silence.

Nous entendent-ils ? Y a-t-il vraiment quelque chose après cette vie ? Nous n'avons aucune certitude. Seulement une espérance. Seulement une foi en celui qui a dit à ses amis : « je m'en vais et je reviens vers vous ». Une phrase on ne peut plus paradoxale puisque le Christ dit en même temps : je pars et je ne pars pas. Nous avons l'impression qu'il dit une chose et son contraire. En tout cas, il ne nous a pas menti quand il a dit qu'il partait. Un peu comme s'il nous disait, aujourd'hui encore, vous ne me verrez plus. Faites-vous bien à cette idée. Vivez sans ma présence visible. Sans doute que je vous manque. Vous aimeriez peut-être voir mon visage, être certain de mon humanité et de ma divinité, contempler en mon regard toute la tendresse du Père pour ses créatures. Tout cela vous y aurez droit mais seulement dans l'éternité. D'ici là, le Christ nous laisse la place c'est-à-dire que tout ce que nous ne ferons pas nous-même ici sur terre pour améliorer l'humanité, il ne viendra pas le faire à notre place. Il nous respecte et nous laisse notre autonomie. Il ne veut pas que nous soyons de simples automates. Il s'en est allé rejoindre le Père pour y préparer notre propre place, notre demeure éternelle.

Ne soyons pas bouleversés, nous vivons tout simplement la vie telle qu'elle a été envisagée dans le plan de Dieu. Il s'en est allé, c'est vrai. Mais en même temps, il reste à nos côtés. Il n'est pas tout à fait parti. Il est là, présent, proche de nous, nous accompagnant sur cette traversée. Il est maintenant présence invisible et pourtant perceptible. Sa présence est plus profonde, plus intérieure. Elle s'enracine au plus profond de ce que nous sommes. Dorénavant, par l'Esprit, Dieu a choisi de se poser en chacune et chacun de ceux qu'il aime. Il vit en nous et reste vivant à jamais par ses paroles à méditer mais également au c½ur de chacune de nos eucharisties. L'Esprit poursuit son ½uvre divine : il est ce souffle qui nous pousse à retrouver Dieu dans les traits de celui qui s'est perdu dans sa vie, qui s'est enfermé dans une solitude de laquelle il n'arrive plus à sortir, qui dans le monde aujourd'hui a faim, ou souffre de la blessure infligée par d'autres. Oui, Dieu le Fils est là, dans chacun de nos visages, dans l'étincelle de nos regards. Il est là, bien là. Mais nous ne pouvons le découvrir et le rencontrer qu'avec l'aide de son Esprit. Ce dernier, troisième personne de la divinité, est invisible et pourtant aussi fort que le vent (nous rappelle la seconde lecture).

Si Dieu est aujourd'hui encore à l'½uvre dans notre monde, c'est par l'intermédiaire de l'Esprit. Un Esprit respectueux de nos libertés, de nos décisions, de nos choix même s'ils ne vont pas dans le sens divin. Un Esprit qui nous accompagne et ne nous lâche pas. Il se réjouit avec nous dans le bonheur et nous soutient dans les moments plus difficiles. Il est douce présence de Dieu sur notre terre. Dieu s'en est allé et pourtant il est toujours là. Il s'en est allé pour que nous puissions le chercher librement, l'aimer sans contrainte. Selon lui, notre dépendance à son égard n'a de sens que si elle est librement consentie, que si cet amour réciproque est une réponse personnelle liée à ce désir de vivre en lui. Mais en attendant un tel jour, Dieu ne souhaite pas nous laisser dans une absence insupportable, insoutenable c'est pourquoi, depuis ce jour, Dieu l'Esprit est à nos côtés. A chacune et chacun de le trouver. Ne le cherchez pas au loin. Dieu l'Esprit est en vous et chez votre voisin.

Amen.