1er dimanche de l'Avent, année C

Auteur: Moore Gareth
Temps liturgique: Avent
Année liturgique : C
Année: 1997-1998

Jésus parlait à ses disciples de sa venue : "Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées par le fracas de la mer et de la tempête..."

Ces paroles de Jésus sont bizarres ; elles sont aussi perturbantes, si nous les prenons au sérieux. Il n'est pas évident non plus de savoir pourquoi nous les lisons et les écoutons le premier dimanche de l'Avent. L'Avent est la saison de l'attente, où nous nous préparons à fêter la naissance du Christ. Qu'est-ce que ces paroles ont à voir avec Noël ou avec la préparation à Noël ?

Elles font partie d'un discours où Jésus parle du temps où Jésusalem sera encerclée par les armées, et où elle sera détruite ; c'est l'heure de sa dévastation. Beaucoup tomberont au fil de l'épée. Tout ordre, toute paix dans la vie humaine disparaîtra. C'est ce que Jésus dit dans les versets précédents. Et maintenant il ajoute que tout l'ordre naturel va être dérangé aussi : il y aura des prodiges dans le soleil, la lune et les étoiles, et la mer sera violente et menaçante. L'ordre deviendra le chaos. Et c'est à ce moment-là que Jésus apparaîtra pour établir le Royaume de Dieu. Le moment de Dieu est un moment de chaos, où toute certitude humaine se perd.

Certains disent que nous, le peuple de Dieu, sommes là pour construire le Royaume de Dieu ; nous pouvons le faire en essayant de construire un monde plus juste, plus humain. C'est ainsi que le salut viendra à nous. Nos efforts peuvent nous sembler faibles pour le moment, et ils le sont ; mais Dieu les comblera. Puisque nous aidons Dieu à faire venir son règne, il nous aidera de sorte que ce que nous faisons maintenant aboutira au Royaume. C'est peut-être vrai, mais ce n'est pas ce que dit Jésus ici. Selon lui, tous nos efforts pour construire un monde civilisé, un monde de justice et paix, aboutiront au chaos. L'homme détruira tout ce qu'il aura construit, et ce qui survivra aux guerres sera menacé par le chaos dans la nature. Jésus n'est pas partisan de l'idéologie du progrès ultime dans les affaires humaines. Certes, le progrès existe, mais il est toujours provisoire. Le Royaume de Dieu ne sera pas construit par ce que nous faisons. La justice et la paix que nous essayons d'établir ne se répandront pas jusqu'au point où on pourra dire du Royaume de Dieu qu'il est arrivé. C'est dans les ruines de notre civilisation et de toute civilisation que Dieu va paraître, selon Jésus. Les juifs croyaient que la Jérusalem qu'ils avaient construite était la cité de Dieu, que le temple qu'ils avaient bâti et qu'ils vénéraient était la véritable maison de Dieu, donc que les deux étaient protégés par Dieu. Mais ce n'était finalement qu'une cité humaine et un bâtiment humain. Ils finiraient par être complètement écrasés.

Ces paroles peuvent nous paraître un peu décourageantes, même déprimantes. Mais, d'autre part, elles nous montrent que le Royaume de Dieu ne dépend finalement pas de nous, de l'humain ; il dépend de Dieu. Et cela nous libère. Nous n'avons pas à travailler pour Dieu. Dieu, créateur du ciel et de la terre, n'a pas besoin de nos petits efforts. C'est plutôt Dieu qui travaille pour nous, et qui se révèlera malgré nous. Le Royaume de Dieu n'est pas une construction humaine, c'est un don divin. Ce n'est pas quelque chose pour lequel nous travaillons ; il ne vient pas de nous, mais de l'extérieur, comme quelque chose de gratuit. C'est pourquoi nous ne voyons pas Dieu dans la force de l'homme, mais dans sa faiblesse, pas dans la victoire mais dans l'échec ; pour nous, le roi de ce Royaume est un homme crucifié. Le salut que nous espérons est un don ; nous n'avons pas à construire ce don, nous avons à l'attendre.

C'est pourquoi nous lisons ce texte aujourd'hui, au début de la saison de l'attente, de cette saison où nous nous préparons à célébrer, non pas ce que nous avons fait pour Dieu, mais ce que Dieu a fait pour nous, à célébrer le don gratuit de Dieu qui est Dieu lui-même.